Paru à Maurice dans La Vie Catholique, 13 mai 2011.

Interview d’Etienne Chomé

Une formation qui entraîne d’étonnantes

trans-formations dans le quotidien !

Gestions des Conflits, session de formation qui a connu beaucoup de succès à Maurice. La vie de beaucoup de personnes en a été transformée. Rencontre avec Etienne Chomé, Belge qui a conçu le parcours.

Qu’est-ce qui vous a amené à donner un cours à Maurice ?

J’y suis arrivé en 1999, envoyé par ma Communauté, le Chemin Neuf. Peu après les émeutes de février 1999, Mgr Maurice E. Piat m’a demandé de lancer une formation en Gestion des Conflits. L’évêque et mon responsable diocésain d’alors, le prêtre spiritain, feu Raymond Zimmermann, ont insisté pour que ce parcours soit accessible à tous, dans ce contexte multireligieux et pluriracial. J’ai ainsi travaillé à le rendre audible par tous, en partant de notre expérience humaine commune. En 2000, j’ai été aussi nommé directeur de l’Ecole de Théologie et des Sciences humaines où cette formation était donnée.

Quel était le profil des participants à l’époque ?

Des gens de tous milieux socioéconomiques – surtout des parents et des enseignants – et de toute religion, – surtout des catholiques, lorsque le cours était organisé dans la salle paroissiale. Le cours a aussi été donné dans plusieurs Cités, à l’Islamic Institute of Education & Training, dans des prisons, etc. En 2005, 45 animateurs mauriciens étaient formés pour prendre le relais. Et je rentrais en Belgique avec ma femme et mes quatre enfants, après 6 années intenses à l’île Maurice. Mais l’aventure « Gestion des conflits » ne faisait que commencer avec la création de l’association CommunicActions en 2006.

Parle-moi un peu plus de CommunicActions.

A Maurice, notre Association présidée par Georgina Corson est au service de la société civile. En plus des cours Tout-Public en 10 séances et des cours conçus pour les collégiens, plusieurs institutions ont bénéficié de parcours adaptés à leurs besoins, comme le B.E.C, l’E.S.J, l’A.P.E.I.M, S.O.S. Village, le R.Y.C et le Half-way Home de Vacoas.

Par ailleurs, une animatrice est partie au Canada, une autre est rentrée en France et c’est ainsi que notre mouvement est devenu international, avec bien des développements nouveaux qui continuent de me surprendre, comme par exemple l’antenne espagnole très active. J’ai aussi donné des sessions au Rwanda, Burundi, Congo, Côte d’Ivoire, Mali. La joie des Africains à

découvrir des outils dont ils n’ont jamais entendu parler me motive beaucoup. En outre, je reviens régulièrement à Maurice pour offrir une formation continue aux animateurs et donner des séminaires à des entreprises mauriciennes.

L’explication du logo de CommunicActions.

Le logo de CommunicActions, qui relie deux personnes, exprime ce passage souple entre l’écoute active et la parole en « je ». Un dialogue réussi s’effectue dans un double travail d’accouchement : identifier mes propres besoins, m’intéresser à l’autre et à ses besoins profonds, puis exprimer les miens.

Comment se déroule le parcours ?

D’abord poser des préalables à un dialogue de qualité. Deux personnes en conflit parlent spontanément sur l’autre et très peu d’elles-mêmes. Sur les 10 séances, Il en faut bien six pour que chacun lâche progressivement l’autre, quitte la tête qui juge, descende en soi et prenne toujours plus la responsabilité de ce qu’il vit. Derrière une parole poison (Jugement, Reproche et Exigence), il y a un trésor à entendre : une préoccupation, un besoin, une valeur. C’est en valorisant et en prenant au sérieux ce trésor que nous pouvons être délivrés de nos « tu qui tuent ». Après avoir écouté celui qui est fermé ou agressif au bon endroit, et une fois les besoins de chacun bien identifiés, nous pouvons chercher une solution ‘win-win’.

Tu as lancé ton premier livre en 2005. Pourquoi le besoin d’un deuxième livre ?

4500 exemplaires du premier livre ont été vendus, dont près de 3500 à Maurice. Dans le deuxième livre, je présente la méthode C-R-I-T-E-R-E qui articule les compétences de communication vraie, de négociation efficace et de cadre de droit, pour mieux gérer nos conflits. Elle est une synthèse originale et novatrice des techniques reconnues pour leur efficacité dans ces domaines, en les appliquant d’une manière claire et précise à nos relations de tous les jours, en couple, en famille, au travail et à l’école. À chaque étape du parcours, un outil et de nombreux exercices fournissent les moyens d’une véritable révolution intérieure et l’art de tirer des accords de nos désaccords.

Quelle richesse t’a apporté le cours ?

Ma femme et mes enfants sont les premiers témoins et bénéficiaires du chemin que j’ai parcouru, grâce à ces outils qui ont profondément changé ma vie et mes comportements. Ayant appris à être meilleur compagnon avec moi-même, je peux mieux écouter les autres.

Je suis aussi frappé d’expérimenter notre commune humanité, malgré nos différentes cultures : les « tu qui tuent » existent partout, mais aussi la beauté du langage où je quitte la culpabilisation pour prendre la responsabilité de mes besoins.

Un mot de la fin…

J’invite en particulier ceux qui ont suivi la session avant le lancement du deuxième livre à se procurer et lire ce livre « La méthode C-R-I-T-E-R-E ». Une formule qui porte beaucoup de fruits est de se mettre en petit groupe pour stimuler cette lecture par une rencontre mensuelle où chacun partage ce qu’il en a retiré, en lien avec ses expériences de vie.

Propos recueillis par Sandra Potié

Photo : SP

Encadré

Le livre est disponible au secrétariat de CommunicActions (466 7943, communicactions@orange.mu, www.communicactions.org), situé juste à l’arrière de la Maison Carné, Rose-Hill.